Les spectateurs entrent dans la salle, s’installent. La lumière s’éteint, laissant s’illuminer le plateau sur un moment crucial dans la vie de Cécile : elle est chez le médecin pour les dernières formalités qui lui permettront de faire un don d’ovocytes.
Cécile a 36 ans - un âge charnière dans la vie d’une femme, notamment sur son choix d’avoir ou non de tomber enceinte. Elle est le fruit d’un amour entre deux femmes : ainsi, elle a deux mamans, un père biologique qu’elle n’a jamais connu, et un père adoptif sévère. On lui connaît une sœur et un frère. Une enfance plutôt atypique. N’ayant point vraiment connu de figure paternelle, elle s’imagine parfois être la fille de Luke Skywalker.
Elle nous conte son parcours depuis l’enfance jusqu’à cette prise de décision. Elle y évoque notamment les liaisons de sa mère Dominique avec Babeth, Jean-Louis (son père biologique parti à l’annonce de la grossesse), et puis avec Philippe (son père adoptif). Il y a aussi les séances chez le psy, où elle se livre sur ses peurs, ses interrogations et ses doutes. Elle nous raconte aussi quelques anecdotes drôles et touchantes sur les étapes - parfois difficiles - du don d’ovocytes.
J’ai une appétence particulièrement développée pour les spectacles seul-en-scène qui m'impressionnent et me fascinent, notamment par la performance propre à chacun de captiver seul un public. Celui-ci ne déroge pas à la règle : avec une mise en scène plutôt sobre (une fenêtre, un rideau, un jeu de lumières, nous indiquant le lieu de la scène), dès le début du spectacle, j’ai été happée par l’histoire de Cécile, son parcours, son background, ses anecdotes, son amour de la vie.
Également, la comédienne campe plusieurs rôles : Cécile, Dominique et Babeth. Elle oscille principalement entre le personnage principal de Cécile, et celui de sa mère Dominique, afin de nous permettre de mieux cerner et comprendre sa prise de décision.
Sujet peu abordé au théâtre, le don d’ovocyte représente pourtant un acte de générosité de la part de femmes entre 18 et 37 ans en bonne santé physique et mentale, pour des femmes en couple ou célibataires qui ne peuvent pas avoir d’enfant. Une mise en avant nécessaire à mon sens, qui met la lumière sur plusieurs formes et volontés de parentalité, et ainsi plusieurs choix de vie autres que les standards de notre société.
“La Trajectoire des Gamètes” est un peu une sorte d’ovni théâtral. C’est aussi un spectacle qui parle de la chance d’être en vie, et aussi du choix - passé 35 ans, soit d’être mère, soit de permettre à d’autres d’avoir un enfant quand la nature n’a pas été généreuse. Venant, pour ma part, de fêter mes 36 ans, j’ai été particulièrement sensible à cette histoire et à cette pièce qui émeut, qui interroge et qui ne laisse pas indifférent.
Sur ce, je vous dis à très vite, et au plaisir de se croiser dans une salle de spectacles, dans la vraie vie, ou bien ici-même, pour un nouveau récit d'aventure théâtrale.