J'ai rencontré Nadir, passionné de spectacle vivant. Il y a quatre ans, il a voulu partager cette passion du théâtre en écrivant et en créant ainsi son blog Les Chroniques de Monsieur N. Récemment, il s'est également lancé en tant qu'attaché de presse pour le théâtre.
Comment est née ta passion pour le théâtre ?
Elle est presque née en même temps que moi. Cela a été un déclic quand j’étais enfant, je devais avoir entre 5 et 6 ans. Je suis tombé sur une pièce de théâtre à la télévision qui est encore gravée dans ma tête à l’heure actuelle. C’est une pièce de Ray Cooney, un auteur britannique de vaudevilles (qu’on appelle également le Feydeau anglais). Cette pièce c'est One for the Pot. Dans la version française, la pièce s'intitule Trois Partout, est adaptée par Pierre Mondy. C’était joué par Michel Leeb (qui jouait trois personnages), Gérard Hernandez, Francis Lax, Christian Pereira, Charlotte Kady. J’ai été subjugué par Michel Leeb qui jouait trois rôles pendant 2h20 non-stop ! Il jouait 3 personnages, 3 frères jumeaux. La cadence, l’humour et tout ça, m’ont scotché. Cette pièce-là est restée gravée dans ma mémoire. Et je me suis dit « je veux faire ça ! ».
Ma plus belle expérience théâtrale en tant que comédien, c’était des textes de Molière en tenue d’époque au Château de Vaux-le-Vicomte, dans les jardins, dans une reconstitution historique sur deux jours, devant 5000 personnes. Alors que je venais de commencer mes cours de théâtre depuis trois mois, un des profs m’a proposé d’intégrer ces représentations.
En fait, au début, je voulais être comédien, je voulais jouer la comédie. J’ai fait des cours de théâtre pendant trois ans. Ma plus belle expérience théâtrale en tant que comédien, c’était des textes de Molière en tenue d’époque au Château de Vaux-le-Vicomte, dans les jardins, dans une reconstitution historique sur deux jours, devant 5000 personnes. Alors que je venais de commencer mes cours de théâtre depuis trois mois, un des profs m’a proposé d’intégrer ces représentations et j’ai joué du Molière avec des professionnels dans le jardin d’un château, avec un costume de laquais, et la grosse perruque. C’était des reconstitutions des fêtes de Nicolas Fouquet.
Au fur à mesure des années, je me suis dit qu’au lieu de jouer la comédie, j'allais écrire sur ceux qui jouent. Même si j’envie ceux qui jouent sur scène, j’écris sincèrement ce que je pense sur eux.
En tant que spectateur, qu’est-ce que tu aimes voir et ressentir au théâtre ?
Il y a un peu de tout. En premier, ça sera des pièces de théâtre, plutôt contemporaines que classiques. Mais, depuis quelques années, je reviens un peu vers le classique selon comment le classique est mis en scène.
Par exemple, en novembre 2018, j’ai vu une pièce de Molière, Le Misanthrope, adaptée par la Compagnie Etincelle, avec tous les personnages principaux mais au 21ème siècle : ils étaient habillés comme nous, avaient des tablettes et téléphones portables, et les dialogues étaient exactement les mêmes que le texte original. Là, j’ai été scotché parce que je découvrais cette pièce d’une autre façon.
J'ai également une préférence pour les comédies car, quand je vais au théâtre, c’est pour me changer les idées. Mais, il faut qu’il y ait du drôle, du drame, des tensions... de tout en fait. Si ce n’est que drôle, cela peut vite me lasser.
Peux-tu nous raconter une anecdote, un moment marquant au théâtre ?
Une pièce qui m’a marqué, c'est la pièce Les Chatouilles, d’Andréa Bescond au Théâtre Antoine. Cette pièce-là est tout sauf une comédie. C’est un drame mais il y a des passages qui sont très drôles.
Quand j’ai vu cette pièce, je me suis pris une énorme claque, à tel point que lorsque je suis sorti de la salle, je tombe sur l’attaché de presse et je lui ai dit : « tu es un enfoiré parce que tu es le premier qui arrive à me faire pleurer avec une pièce de théâtre ».
J’ai tellement été scotché, touché par ce qu’elle raconte que, que l’on soit un homme ou une femme, que l’on soit jeune ou vieux, on ne peut pas être insensible à cette histoire. Et la performance d’Andréa Bescond et la mise en scène d’Eric Métayer sont juste une véritable pépite.
Il y a aussi le spectacle Palace, que j'ai vu au Théâtre de Paris. Palace était la série que je regardais étant plus jeune, une série culte. Voir cette adaptation sur scène, écrit et mis en scène par Jean-Michel Ribes et Jean-Marie Gourio, je me suis cru face à un spectacle de Broadway. Et j’ai eu le plaisir de pouvoir rencontrer après la pièce Jean-Michel Ribes et Jean-Marie Gourio.
Et dans les événements marquants, il y’a eu sans hésitation ma rencontre avec Gabrielle Gay et la Compagnie Les Mauvais Joueurs, qui fut le prologue de ma carrière d’attaché de presse. J’ai été contacté par Gabrielle en tant que blogueur pour venir découvrir sa pièce, Ecoutez leur Silence, qui se jouait à ce moment là à guichets fermés au Théâtre du Gouvernail. J’assistais à la dernière et j’ai été subjugué par le travail d’auteure et de metteuse en scène de Gabrielle, ainsi que par le talent de ces 8 jeunes comédiens.
Après avoir écrit un article, je suis resté en contact avec Gabrielle, et grâce à elle je fis mes premiers pas en tant que chroniqueur radio à Paris et à Avignon.
Egalement, lors de l'annonce officielle de la programmation d’Ecoutez Leur Silence au Funambule Montmartre pour le dernier trimestre 2019, je lui ai fait une proposition : m’occuper de la presse et de la communication de la pièce et de la compagnie lors de la programmation à la rentrée, alors que je n'avais aucune expérience dans ce domaine, et malgré cela, Gabrielle accepta. J’ai passé 3 mois sublimes avec toute cette équipe, j’ai aimé faire ça et être tout les soirs avec eux : Dorothée, Emie, Astrid, Marie, Juliette, Nadhir, Tom et Vincent.
Que je sois spectateur ou comédien, pour moi, la scène, la première chose que ça m'apporte, c’est de l’évasion
Que t’inspire la scène en tant que spectateur et en tant que comédien amateur ?
En fait, que je sois spectateur ou comédien, pour moi, la scène, la première chose que ça m'apporte, c’est de l’évasion. C’est-à-dire que, tu passes tes journées au travail, tu as des fois des journées longues, fatigantes, tu vas le soir au théâtre ou tu vas le week-end voir une pièce, et tu mets ta vie en stand-by pendant 1h30 à 2h.
En dehors des métiers du spectacle, je travaille dans une grande surface, dans la grande distribution : pendant 1h30-2h, je ne suis plus le responsable de caisse d’une grande surface, je suis le spectateur, je suis le comédien, je suis le témoin d’une histoire. Que ce soit l’histoire de la pièce, que ce soit l’histoire de la troupe, que ce soit l’histoire du théâtre. Je suis un témoin de la vie, d’une autre vie de celle qui est la mienne.
Pour moi, le théâtre me fait penser à une phrase entendue dans une série que j’ai vue il y a quelques années, : quelqu’un qui est passionné de cinéma va faire les trucs les plus délirants pour sauver un film, et le comédien principal lui dit « mais le cinéma compte tant que ça pour vous ? », et le personnage lui répond « ça me permet d’oublier ma vie et mes ennuis au boulot ». Le Théâtre – comme le Cinéma d’ailleurs – permet, pendant 2h, de vivre une vie différente, d’être quelqu’un d’autre, d’être dans un autre monde, dans une autre époque, dans une autre histoire que la nôtre.
C’est le personnage de Homer Simpson qui dit cette phrase, dans la série Les Simpson.
Et en fait, cette phrase-là est criante de vérité : les gens qui vont au théâtre ont envie de s’évader, de vivre autre chose que la vie qu’ils voient tous les jours. Ils se coupent du monde, ils coupent leur portable, ils coupent même leur cerveau.
C’est ça que je trouve extraordinaire dans le théâtre : c’est un moyen d’évasion et un moyen de vie, et même pour certain de survie.
Et il y a un autre truc – et là c’est le comédien qui en parle – c’est que le théâtre, et le fait de prendre des cours de théâtre, permet de faire disparaître la timidité. Avant, je n’osais pas parler, j’ai fait trois ans de cours de théâtre et maintenant je peux me permettre même « d’envoyer chier » mes clients quand ils me manquent de respect, mais toujours avec diplomatie, à l’image du personnage de Monsieur Honoré dans Edmond, pièce d’Alexis Michalik. Je les remets à leur place avec poésie et courtoisie.
Trois artistes qui t’inspirent et pourquoi :
Le premier est un modèle et une référence, c’est Coluche. Parce que ce monsieur-là, qui est parti d’un petit café-théâtre et d’une timidité maladive est devenu une véritable icone qui pouvait faire rire et « déranger » uniquement avec son franc-parler.
Le second mentor, c’est Louis de Funès. C’est un petit pianiste de café-concert qui est devenu cette idole de toutes les générations.
Et pour le troisième mentor, je vais en dire deux car je ne peux pas choisir entre les deux. Il y a en a un qui est une icone internationale, c’est Charlie Chaplin. Il a donné des lettres de noblesse au burlesque. Pour moi, c’est un Dieu Vivant.
Et le second, c’est Mel Brooks, qui a fait des films que je trouve extraordinaires. Par exemple, dans Les Producteurs, il critiquait le monde du music-hall de Broadway. Mel Brooks casse les codes sans jamais se faire d’ennemis, et c’est ça que je trouve extraordinaire parce que dans ses œuvres il critique en parodiant et sans blesser, et tous ses films sont devenus des films cultes.
Il y a aussi toute la Troupe du Splendid, et notamment Gérard Jugnot, parce qu'il peut autant faire rire qu’émouvoir. Je repense à Meilleur Espoir Féminin ou Monsieur Batignolles qui sont juste des films magnifiques.
En parlant de troupes et de compagnies de théâtre, Nadir a évoqué notamment, pendant l'interview, l'exemple de la Compagnie Les Joyeux de la Couronne. Une mention spéciale à cette jeune compagnie très prometteuse.
Cette compagnie a fait un travail extraordinaire en créant le spectacle L’Empereur des Boulevards sur la vie de Feydeau – et je rêverai que cette compagnie, qui a un talent énorme, un potentiel énorme, puisse faire de L’Empereur des Boulevards ce qu’Alexis Michalik a fait avec Edmond : c’est-à-dire, dans un premier temps, jouer dans une plus grande salle, et même que cette pièce devienne un film, parce que cela pourrait être quelque chose d’extraordinaire.
On connaît beaucoup les pièces de Feydeau mais on ne connaît pas beaucoup l’homme derrière les pièces. Olivier Schmidt et sa compagnie - pour ses adaptations, ses écritures, ses mises en scène - ont un potentiel de talent d’écrit et d’imagination énorme. C’est quelqu’un que j’admire pour son talent d’auteur, de metteur en scène, d’adaptateur, et de comédien. Et j’admire autant sa compagnie pour les mêmes choses.
C’est une compagnie que j’ai découvert il y a deux ans avec Ludwig II : le Roi Perché au Théo Théâtre, et plus je découvre leurs créations, plus je suis subjugué par ce qu’ils font, autant dans le jeu de comédiens, dans la danse, dans le chant, c’est magnifique.
Trois lieux de spectacles qui t’inspirent et pourquoi :
Le premier, c’est un lieu culte, c’est L’Olympia. C’est tous les grands noms internationaux qui sont passés là-bas… Piaf, Bécaud, Aznavour… Pour moi, qui suis un passionné de variété française, c’est un lieu culte. Je regrette un peu d’ailleurs que maintenant l’Olympia – qui était un monument de spectacles – est maintenant devenu un peu The Place to Be. A l’époque, pour faire l’Olympia, il fallait faire des pieds et des mains, il fallait faire énormément de trucs. Aujourd’hui, je trouve qu’on va « trop facilement » à l’Olympia grâce aux moyens financiers.
Le second, c’est le Festival OFF d’Avignon, que j’ai vécu pour la première fois en 2019 et qui a été un véritable marathon. C’est une ruche où tu as des pépites extraordinaires. Quand je l’ai vécu, ça a été mon « Disneyland » pendant trois semaines.
Le troisième lieu, il y en a deux : la Comédie Bastille, où je faisais mes cours. Et l’autre, ce sont les jardins du Château de Vaux-le-Vicomte, où j’ai vécu une vraie expérience de comédien professionnel en jouant du Molière devant 5000 personnes en tenue d’époque (on jouait trois fois par soir des pièces de 15 minutes). C’était, pour moi, une expérience magnifique.
Hercule Poirot, parce que c’est un petit bonhomme rondouillard qui ne paye pas de mine, qui peut être insignifiant, mais qui a beaucoup plus d’œil, de cerveau et de cœur qu’il n’y parait.
...si tu étais une citation ou une réplique :
Mon mantra serait : « Ne juge pas si tu ne veux pas être jugé à ton tour. »
Quand une personne me demande pourquoi je ne le juge pas, je réponds à cette question par « Qui suis-je pour juger ? ». Parce que je ne suis rien pour juger et il n’y a aucune raison pour juger la vie des autres où la manière de faire de telle ou telle personne. Je me permets de juger des choses flagrantes, mais concernant la vie des uns et des autres, les petits travers ou les petites bêtises des uns et des autres, je ne suis rien pour les juger. Je suis un être humain, j’ai des failles, j’ai des qualités, j’ai des défauts, comme tout le monde. On a tous fait des erreurs dans notre vie.
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À propos
Lauriane, théâtreuse passionnée, met en lumière le monde du spectacle, pour ajouter plus de théâtre à la vie et plus de vie au théâtre.
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