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Rencontre avec Sophie Imbeaux, comédienne

Rencontre avec Sophie Imbeaux, comédienne
Pour cette nouvelle interview, j'ai rencontré la comédienne Sophie Imbeaux, qui à l'occasion de son tout premier spectacle seul-en-scène, "Le monde merveilleux du Colibri".
Peux-tu décrire le lieu où l’on se trouve et en quoi il t’inspire ?
 
Sophie Imbeaux : Ce lieu s’appelle « L’Etoile de Montmartre » et il est dans le 18ème arrondissement. Je suis du quartier du 18ème depuis pas très longtemps et c’est l’un des premiers bars dans lesquels je suis rentrée et qui m’a un peu donné la sensation d’être à la maison. C’est très familial. J’ai tourné ici ma première vidéo de « La petite voix » qui s’appelle « L’Attente ». Ils ont été très chaleureux et m’ont accueillie avec beaucoup de simplicité en me disant « on te laisse faire ton tournage comme tu veux. »
C’est un lieu que j’aime beaucoup parce qu’on y partage beaucoup avec les gens, et à Paris, comme c’est une très grande ville – souvent ça manque un peu de contact humain – je trouve cela super d’aller dans le troquet du coin et de papoter.

Le fait de monter sur scène toute seule, c’est un des plus grands défis que je ne me suis jamais fixé.

Tu joues ton premier spectacle « Le monde merveilleux du colibri ». Cela fait longtemps que tu souhaitais l’écrire ?
 
Sophie Imbeaux : C’était un défi que je m’étais fixé de monter sur scène toute seule. J’ai mis un an et demi à l’écrire avec Patrice Soufflard, mon co-auteur et metteur en scène.
C’était un souhait de monter toute seule sur scène parce que j’avais envie de me faire le petit challenge des 30 ans – j’ai eu 30 ans cette année – et je me suis dit « est-ce que je suis capable de le faire toute seule ? est-ce que je suis capable d’avoir plein de personnages, de les tenir, d’emmener les gens dans l’histoire ? ».
 
Comment ton spectacle est-il né et qu’évoque-t-il pour toi ?
 
Sophie Imbeaux : Il est né un peu difficilement parce que je trouve cela toujours très compliqué de savoir précisément ce que tu veux raconter sur un plateau.
Pendant très longtemps, lors de l’écriture avec mon co-auteur, on se disait qu’on avait plein d’idées mais pas d’histoire. Et il était très important pour nous d’avoir une histoire qui parle aux gens, qui puisse être universelle où chacun peut se reconnaître même s’il n’a pas vécu l’histoire en question.
Je raconte l’histoire d’une fille qui voit tout de façon positive, qui est à la limite du syndrome d’Asperger. Elle ne se rend pas compte de l’univers dans lequel elle vit, de la négativité du monde, jusqu’à ce qu’elle ait un choc et qu’elle prenne conscience de tout ça.
Je ne voulais pas monter sur le plateau en tant que Sophie Imbeaux parce que je pense que raconter ma vie n’était pas très intéressant sur un plateau.
A l’école de théâtre, on te dit toujours d’arriver sur le plateau avec un message, ou en tout cas avec une position, et c’était très important pour moi d’arriver avec une position forte et de pouvoir la défendre.
 
 Si tu devais pitcher ton spectacle en une courte phrase ?
 
Sophie Imbeaux : « Clémentine a tout pour être heureuse. Elle est célibataire et sans ami. Est-ce que tu veux connaître sa recette ? »
Plus généralement, quel est ton rapport au théâtre et aux spectacles ?
 
Sophie Imbeaux : Mon rapport au théâtre est très fort parce que je suis montée sur scène à l’âge de 12 ans et j’ai eu une révélation sur le plateau quand j’ai entendu les premiers rires dans la salle, en me disant « bon sang, je sais faire rire ! ». Je trouvais cela extra.
Le théâtre a toujours été un lieu assez fascinant parce que tu n’as qu’une chance. Quand tu montes sur le plateau, ce n’est pas comme au cinéma où tu peux faire la prise plusieurs fois. Tu n’as qu’une chance et il faut la saisir.
Ce que je trouve magique au théâtre, c’est que tu peux emporter le public avec toi très loin. Je trouve cela fabuleux d’avoir encore un art aujourd’hui – où tout le monde est très connecté – où tu peux dire aux gens « pendant 1h15, on va tous être enfermés dans une salle et je vous demande de m’écouter. »
Aujourd’hui, on n’est tellement plus connectés les uns aux autres que je trouve ce métier magnifique parce que c’est l’un des seuls métiers au monde où tu peux vraiment parler d’âme à âme.
 
Qu’est-ce que tu aimes voir et ressentir au théâtre ?
 
Sophie Imbeaux : La vraie grosse claque que j’ai prise l’année dernière, ça a été « Les Chatouilles » d’Andréa Bescond. Je n’avais jamais autant pleuré au théâtre de ma vie.

Au théâtre, j’aime être bouleversée dans tous les sens du terme. J’aime exploser de rire. J’aime pleurer à chaudes larmes. J’aime être remuée. Et s’il ne s’est rien passé pour moi, cela veut dire que l’expérience n’a pas été réussie. Il faut que la palette d’émotions à l’intérieur ait été secouée et que en tout cas j’en ressorte plus nourrie d’une façon ou d’une autre.

Je suis aussi une grande fan de Jacques Gamblin qui arrive à faire passer beaucoup d’émotions et qui n’est pas que dans le rire. Je trouve cela formidable aujourd’hui à l’ère du stand-up et de ces mouvements d’humour très à la mode, où il faut une vanne toutes les dix secondes et où il faut que ça rigole tout le temps. Je suis beaucoup plus sensible aux univers poétiques et aux univers où on te fait voyager et où on ne fait pas que rire. Je trouve que Jacques Gamblin a une beauté et une douceur formidables dans son théâtre. Et puis à côté de ça, j’adore les Chiche Capon. J’adore leur absurdité.
Au théâtre, j’aime être bouleversée dans tous les sens du terme. J’aime exploser de rire. J’aime pleurer à chaudes larmes. J’aime être remuée. Et s’il ne s’est rien passé pour moi, cela veut dire que l’expérience n’a pas été réussie. Il faut que la palette d’émotions à l’intérieur ait été secouée et que en tout cas j’en ressorte plus nourrie d’une façon ou d’une autre.
 
Que t’inspire la scène ?
 
Sophie Imbeaux : C’est un sentiment qui est hyper ambivalent. Le fait de monter sur scène toute seule, c’est un des plus grands défis que je ne me suis jamais fixé. Je trouve que c’est d’une dureté sans nom de monter seule sur un plateau. Et à la fois, c’est formidable parce que je passe par toutes les émotions.
Quand tu es toute seule derrière le rideau, tu te dis « j’espère qu’ils vont m’aimer, j’espère que ça va leur plaire, j’espère qu’ils vont en ressortir nourris. Ils ont misé sur mon spectacle ce soir et j’espère être à la hauteur de leurs attentes. » Et puis, quand tu es sur le plateau, le public t’envoie tellement d’amour et tellement de bienveillance, que j’en ressors boostée comme si j’avais eu un « free hug » de tout Paris.
Le théâtre, c’est un peu la vie, ça te bouleverse dans tous les sens du terme.
Quand je monte sur le plateau, je passe de la négativité à la positivité en un rien de temps. J’ai l’impression de vivre un condensé de vie.
As-tu un rituel avant de monter sur scène ?
 
Sophie Imbeaux : Je fais pas mal de méditation pour calmer ma respiration parce que je suis quelqu’un d’assez anxieuse. Je me fais une bulle de bienveillance autour de moi. J’envoie de l’amour à mes proches : je leur envoie souvent un petit texto d’amour comme si je leur disais un peu « adieu », en mode « je vous aime très fort », pour être entourée de gens que j’aime. Et puis je me fais quelques exercices de cardio, je m’échauffe bien en amont, je fais un peu de yoga, et on y va.

Quand je monte sur le plateau, je passe de la négativité à la positivité en un rien de temps. J’ai l’impression de vivre un condensé de vie.

Quelles seraient tes inspirations professionnelles, artistiques et humaines ?
 
Sophie Imbeaux : J’aime beaucoup Jacques Gamblin et Andréa Bescond. J’aime beaucoup Kyan Khojandi aussi, je trouve qu’il a un rapport à ce métier qui est tout à fait juste, à la façon de l’appréhender.
En inspirations humaines, Alexandra Desloires, ma partenaire de jeu de « Jeux de Planches » m’inspire beaucoup. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un avec autant d’énergie positive, autant de bienveillance et autant de rires dans une seule personne.
Et je dirais aussi mon frère, Alexandre Imbeaux qui m’a beaucoup aidée dans ce chemin du théâtre qui n’est pas évident. Il m’a toujours poussée. Je l’admire beaucoup parce qu’il a toujours entreprit des projets assez compliqués qu’il a toujours mené à bien.
 
Si tu devais choisir trois moments marquants et décisifs dans ta carrière qui t’ont permis d’avancer, quels seraient-ils ?
 
Sophie Imbeaux : Le premier moment marquant, c’est celui où j’ai eu la révélation de mon binôme de théâtre, Alexandra Desloires. On était au Cours Florent toutes les deux. On avait fait une scène de Martin Crimp, avec des valises desquelles on sortait des morceaux de viande, des confettis, du sang… il y en avait partout sur le plateau. C’était complètement fou, et on est sorties du plateau en se disant « il s’est passé quelque chose ». On a eu une sorte de coup de cœur artistique toutes les deux. On s’est dit qu’il fallait qu’on travaille ensemble. C’est de là qu’a commencé à naître « Jeux de Planches », notre premier spectacle ensemble.
Le deuxième moment marquant a été la fois où je suis montée toute seule sur le plateau. C’était le 6 juillet 2018. A la fin de mes 1h15, je suis sortie du plateau en me disant « je l’ai fait. OK, je suis capable de monter toute seule sur un plateau. » Je ne m’en sentais tellement pas capable, et prendre conscience de ça était assez formidable.
Le troisième moment marquant a été quand j’ai reçu un prix d’interprétation dans un festival étudiant. Je jouais à l’époque dans « Des souris et des hommes » de Steinbeck. Je jouais la Souris, la femme qui se fait tuer à la fin. J’ai reçu un prix d’interprétation pour ce rôle-là, et je me suis dit « Ah ! J’ai peut-être ma place. » La reconnaissance des pairs, c’est formidable, parce qu’on te donne un certain aval et cela m’avait fait beaucoup de bien. Je m’étais dit « alors, ça veut dire que j’ai une petite place et que je peux continuer. »

J’ai envie de tout faire, tout tester, tout lire, tout voir et si je pouvais me balader d’une expo à un bouquin, et d’un bouquin au cinéma, et du cinéma à une soirée avec les copains, j’adorerais

Si demain, on te donnait l’opportunité de réaliser un de tes rêves, quel serait-il ?
 
Sophie Imbeaux : Je rêve de me télétransporter, d’avoir le don d’ubiquité ou la télétransportation. Si je pouvais l’avoir demain, je serais ravie parce que j’aime faire mille choses à la fois. Je suis quelqu’un de très impatiente. Si, par exemple, demain je joue au théâtre et que j’ai un anniversaire après, j’adorerais pouvoir me télétransporter après le théâtre pour être directement à l’anniversaire.
J’ai envie de tout faire, tout tester, tout lire, tout voir et si je pouvais me balader d’une expo à un bouquin, et d’un bouquin au cinéma, et du cinéma à une soirée avec les copains, j’adorerais. Ça, ce serait un de mes rêves.
 
Quel conseil donnerais-tu face à la peur d’oser se lancer ?
 
Sophie Imbeaux : Il se trouve que j’ai assez peu confiance en moi. Ce que je fais pour me pousser à monter sur le plateau seule, c’est de ne jamais rien lâcher.

Fais les choses de ton côté, avances, créés des projets et surtout ne te compare pas aux autres parce que tu es unique, par définition. Donc, tu feras les choses différemment, même si les gens diront « ça a déjà été fait mille fois », tu les feras différemment, donc fonce.

Il n’y a pas très longtemps, mon frère m’a dit une citation de Nelson Mandela que je ne connaissais pas et qui dit « Dans la vie, soit je réussis, soit j’apprends. »
Ma théorie, c’est que la peur n’évite pas le danger – comme je disais, je suis quelqu’un de très peureuse – et souvent la peur t’empêche de faire des choses. Un réflexe primaire est de te protéger et de te dire « non, n’y va pas, c’est trop dangereux. » Mais en fait, tu te rends compte que monter sur un plateau ce n’est pas dangereux, entreprendre un rêve ce n’est pas dangereux. Au pire, tu apprends. Au pire, tu rates, et après ? Au moins, tu auras testé, tu n’auras pas de regrets, tu seras allé au bout.
Je suis en train de faire une détox des réseaux sociaux parce que je me rends compte à quel point tout ça peut faire du mal et peut créer des émotions qui n’ont pas lieu d’être, de jalousies, d’envies, etc.
Fais les choses de ton côté, avances, créés des projets et surtout ne te compare pas aux autres parce que tu es unique, par définition. Donc, tu feras les choses différemment, même si les gens diront « ça a déjà été fait mille fois », tu les feras différemment, donc fonce.
Retrouvez Sophie dans son spectacle « Le monde merveilleux du colibri »
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Lauriane Cronier

Lauriane, théâtreuse passionnée, met en lumière le monde du spectacle, pour ajouter plus de théâtre à la vie et plus de vie au théâtre.
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